Vice-Présidente de la Commission des Droits de la femme et de l’Egalité des Genres au Parlement Européen et Présidente de l’Union Européenne des Femmes, la Députée européenne Elisabeth Morin-Chartier (PPE) nous livre son analyse et ses positions sur les questions liées à l’égalité des carrières et l’entrepreneuriat féminin.
Rapporteur permanent sur le Fonds Social Européen, elle revient également sur le rôle de ce fonds dans le développement professionnel des femmes.
Peut-on dire que l’égalité homme-femme est en constante progression en Europe ? Quelles devraient être les grandes priorités de la Commission des Droits de la Femme et de l’Egalité des Genres après les élections ?
Ce qui est en constante progression, c’est l’égale formation des filles et des femmes en Europe. Là où je deviens très prudente, c’est que cette formation conduit les jeunes femmes à des filières professionnelles différentes des hommes. En conséquence, dès l’entrée dans la vie professionnelle, l’écart se creuse entre les hommes et les femmes.
L’une des priorités de la Commission des Droits de la Femme et de l’Egalité des Genres devra donc être l’égalité des carrières, d’autant plus que la carrière des femmes est très largement impactée par la maternité. A la naissance du premier enfant, la femme a tendance à réduire sa responsabilité de poste. A la naissance du second enfant, elle passe à temps partiel et à la naissance du troisième enfant, elle va avoir pratiquement que 50% du temps de travail.
Les femmes vont donc avoir une carrière beaucoup plus plate et lente que les hommes et, à la fin de leur vie professionnelle, les femmes gagnent en moyenne 34% de moins que les hommes !
Etes-vous favorable à une politique des quotas, dans le secteur public comme dans le secteur privé ?
J’étais contre les quotas car je pensais que les femmes pouvaient réussir par leur compétence. Aujourd’hui, je me dis que non, les quotas sont un mal obligatoire, un passage obligé pour arriver à cette égalité.
Mais les quotas ne suffisent pas ! Si on ne s’attaque pas au problème des carrières, au problème de la conciliation de la vie familiale et professionnelle, on n’y arrivera pas.
Est-ce que l’Europe peut en faire davantage pour promouvoir l’entrepreneuriat féminin ?
Biensûr. L’Europe doit être au leadership de toutes ces évolutions de société extrêmement importantes.
Tout d’abord, parce qu’il en va de la compétitivité de l’Europe dans le monde. Deuxièmement, parce que l’Europe défend des valeurs d’égalité des citoyens. Et enfin, si l’on regarde ce qui se passe ailleurs dans le monde, nous voyons qu’un pays comme le Japon, pour sortir de la crise économique qu’il a traversé, s’est appuyé sur qui ? Sur les femmes.
D’autres études, des études américaines par exemple, montrent que des entreprises où la mixité est forte, ou où les femmes sont au Board résistent mieux à la crise économique que les autres.
Donc oui, oui, oui, vive l’entrepreneuriat féminin !
Vous êtes Rapporteur Permanent sur le Fonds Social Européen. Est-ce que l’insertion professionnelle des femmes et l’entrepreneuriat féminin sont particulièrement soutenus par le FSE ?
Absolument. Quels sont ses publics cibles du FSE?
En premier lieu, ce sont les jeunes, mais particulièrement les jeunes femmes. En effet, une jeune femme à compétence égale, à diplôme égal et à poste égal, met 6 mois de plus à rentrer dans l’emploi qu’un jeune homme et elle va y rentrer avec un salaire inférieur de 16%.
Le deuxième public cible, ce sont les femmes qui ont été extrêmement fragilisées par la crise économique. D’une part, parce qu’elles étaient prioritairement dans des temps partiels et des temps précaires, contrats qui ont été les plus supprimés. D’autre part, parce que les femmes sont plus nombreuses dans les emplois publics et qu’elles ont donc été victimes des politiques publiques.
Il faut donc que les femmes se libèrent de ce plafond de verre. Parce que si elles ne se libèrent pas, notamment dans l’entrepreneuriat, elles vont vers des filières, sur des statuts, vers des emplois qui ne leur garantissent pas la carrière qu’elles méritent.
Est-ce difficile d’être une Députée Européenne femme ?
Ma réponse est non ! Nous sommes dans ce Parlement Européen tellement nombreux, de cultures mélangées avec 28 Etats Membres et 23 langues, que la culture de l’autre et le respect de l’autre sont déjà dans nos gènes.
De plus, au niveau du Parlement Européen, aucun groupe politique n’a la majorité absolue. Il faut donc toujours aller écouter l’autre et trouver avec un autre groupe politique, un autre député, le point de consensus. Il faut écouter, respecter. Je trouve que c’est très bien. C’est une très bonne base pour l’égalité homme-femme.
Enfin, je suis très fière de travailler dans un Parlement où nous sommes presque 40% de femmes ! Les politiques nationales devraient s’en inspirer car on arrive à 40% alors qu’il n’y a pas de lois de la parité ou de quotas dans tous les pays.
C’est un Parlement où l’on respecte les différences et en particulier l’égalité homme -femme.